Lettres à un souverainiste by Léa Clermont-Dion

Auteur:Léa Clermont-Dion [Clermont-Dion, Léa]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782896496181
Éditeur: VLB éditeur
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

LÉANE LABRÈCHE-DOR

Très cher souverainiste que je ne connais pas,

Je pourrais commencer par dire qu’il a plu le lendemain des élections.

Je pourrais dire que la pluie c’est ce que les enfants appellent des larmes.

Je pourrais dire Miron.

Je pourrais dire que c’est la faute des Français, qui ont fait de cette colonie une colonie comptoir, une colonie mercantile, un citron pressé sans plus aucun jus…

Je pourrais dire le courage des parents qui se lèvent aux aurores et bravent les froids québécois, et le déneigement des voitures, et les ponts embouteillés, pour aller reconduire les enfants à l’école, avant le travail.

Je pourrais dire le génie de Robert Lepage.

Je pourrais dire qu’on est passé à un cheveu, un tout petit cheveu…

Je pourrais citer Georges Dor.

Je pourrais parler d’Elvis Gratton.

Je pourrais parler des ruelles de Montréal.

Je pourrais dire qu’on est quelque chose comme un grand peuple.

Je pourrais te dire qu’il faut la passion de Falardeau.

Je pourrais dire qu’il y a plus de 1001 façons de manger les fromages d’ici.

Je pourrais te montrer un Le Sauteur.

Je pourrais m’habiller, juste pour toi, dans les vêtements d’Ève Gravel.

Je pourrais décrire le bonheur de faire une sieste, sous un arbre, au parc Laurier.

Je pourrais parler de l’odeur d’ici.

Je pourrais te dire Chevalier De Lorimier.

Je pourrais te dire Luc Picard qui joue De Lorimier.

Je pourrais te montrer un billet de 20 dollars, pointer le visage de la reine et te dire: «Really??»

Je pourrais parler des fameux bols de salade de pâtes, des sandwichs pas de croûtes, du balôné en rouleau avec une olive qui sèche tranquillement au bord de l’assiette.

Je pourrais dire que le P’tit Québec, c’est 5,49 $, mais que le grand Québec, le Québec qui regorge de ressources naturelles, ne devrait pas être vendu à petit prix.

Je pourrais parler des séries éliminatoires du hockey.

Je pourrais parler des guerriers qui sortent fumer des cigarettes l’hiver et qui s’entassent dans les escaliers en béton devant les bars.

Je pourrais chanter que mon pays ce n’est pas un pays… mais qu’il serait bien temps.

Je pourrais parler des Noëls, des réveillons, de la boisson, des amis, de la famille.

Je pourrais dire la beauté de l’île d’Orléans.

Je pourrais dire Céline Dion, oui je pourrais dire ça.

Je pourrais dire que notre langue est complexe et belle et que, bien qu’elle soit québécoise, il s’agit tout de même de la langue française et qu’on nous l’enseigne comme de la marde.

Je pourrais dire qu’il faut connaître les notes avant de jouer la musique, et ensuite, pleurer le programme de français.

Je pourrais dire qu’on est différents, et qu’il n’y a rien de mal à ça…

Je pourrais citer une renarde, et un mal peigné.

Je pourrais dire la beauté des filles au printemps.

Je pourrais dire Gauvreau. Je devrais dire Gauvreau.

Pâté chinois.

Je pourrais parler des cordes à linges romantiques et colorées.

Je pourrais parler des cabarets des années soixante.

Je pourrais dire les bleuets.

Je pourrais dire: si je nous ai bien compris, on est en train de se dire à la prochaine fois?

Je pourrais parler de la Poune, de la Bolduc, d’Olivier Guimond,

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